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Articles parus dans le bulletin du maire de 2008

Les lavoirs

Les lavoirs à Chasselas

lundi 30 mars 2009, par Paule Vermylen-Milamant

Les lavoirs à Chasselas...

On en comptait quatre, cinq....

Le plus ancien peut-être, aux Rochettes, simple retenue d’eau sur l’Arlois, aménagée de pierres plates où les vigneronnes pouvaient rincer leur lessive. Les orages en ont dispersé les pierres et rétabli l’Arlois dans son lit étroit.

Le plus original, le plus petit, le mieux conservé, une miniature de lavoir en somme ... c’est le lavoir de l’église. Le seul qui puisse encore nous faire rêver aux « lavées » d’avant la machine, cela fait près d’un demi-siècle.

Les communs du château abritent aussi un lavoir qui joua son rôle jusqu’à l’arrivée du lave-linge. Puis, il servit de fosse pour recevoir fagots et matériaux divers. Ce fut Monsieur Reme qui au cours de ses travaux de restauration le retrouva et redonna à ses pierres roses leur lustre d’antan.

Un peu à l’écart du village, le lavoir d’en "Avonne", en partie comblé par la boue charriée par les orages, recouvert par les ronces et les herbes folles aurait sans doute disparu de nos mémoires, si le maire et son conseil municipal n’avaient entrepris de le dégager de son linceul de sédiments.
Dans le cadre du « petit patrimoine », la restauration du lavoir d’en Avonne est prise en charge par la Communauté des communes, et s’effectuera au printemps prochain. [1]

Et, dans la mémoire des anciens, un fantôme revient les visiter quand ils traversent la place : celui du lavoir démoli en 1974 suite à une décision du conseil municipal. On ne peut hélas le ressusciter, mais je vais essayer de vous le raconter.

On retrouve sur un plan terrier, daté de 1768, figurant la place de Chasselas, une croix qui, elle, s’en alla orner le nouveau cimetière quand ce dernier fut créé, et, une source... Ce point d’eau où la paysanne venait remplir sa cruche, laver son linge et les animaux étancher leur soif, se trouve à l’emplacement de notre ancien lavoir. Il est vraisemblable que des aménagements, des améliorations successives se concrétisèrent en un ouvrage de maçonnerie dont on retrouve la description dans un rapport en date du 20 février 1863 :

Ce rapport fait état du délabrement complet du lavoir qui devient un foyer d’insalubrité. Les femmes se plaignent « de se casser les reins » et « d’attraper la mort » à frotter et rincer leur lessive sur des pierres trop basses, dans un lavoir ouvert à tous les temps. La bise n’est pas une douce caresse quand elle s’engouffre sur la place...

On se prend à rêver quand on lit qu’à cette époque : « les ressources de la commune s’étant accrues, et, en voie de s’accroître encore, par suite de l’extraction des pavés sur le communal de la Roche noire, on pouvait non seulement réparer le lavoir existant, mais plus encore, le faire couvrir ... » ce qui fut fait.

Et, pendant un siècle les ménagères y amenèrent sur leur brouette le linge à rincer. C’était l’occasion, pour elles, d’y rencontrer d’autres laveuses, de s’y raconter les évènements, les petits, les grands, les accouchements surtout. Les hommes tenaient salon dans les caves, les femmes au lavoir. Et les enfants jouaient à - courir sans glisser ! - sur les pierres du pourtour, enduites du savon des laveuses.

A mon retour au village, à l’aube du XXIe siècle, le bitume avait recouvert les mânes du lavoir, meurtrie, le cœur chagrin, je lui dédiais ce poème :

« Requiem pour un lavoir »

L’eau n’arrivait plus chantante et fraîche
Dans ton bassin aux pierres roses.
Tu te mourais, exsangue.
La vase, les cailloux, lancés par les gamins
Amusés par leurs ricochets sans fin,
Dormaient dans ton lit désert.
 
Le lave-linge, dans les foyers, avait fait son entrée.
Une invention chasse l’autre.
On n’était pas des arriérés à Chasselas !
La voiture il fallait parquer !
Alors, qu’à Dieu ne plaise
Place au progrès !
 
Paix à ton âme,
Repos à tes mânes,
Par le bitume recouverts.
Sous la place, dors en paix,
Vieux lavoir !
 
Et continue de revenir hanter
Quand la nostalgie nous ramène au passé
Nos mémoires !

Portfolio


[1Cette restauration a été réalisée en 2009